Lourde addition pour les meneurs d’Afrique du Sud
La commission de discipline de la FFF a sanctionné durement quatre des cinq meneurs de Knysna, notamment Nicolas Anelka, dont la carrière internationale est probablement terminée.
Après quatre heures de débat et une autre pour délibérer, la commission de discipline de la Fédération française de football (FFF) a pris ses responsabilités et lourdement sanctionné le comportement de quatre des cinq Mondialistes qu’elle jugeait. Nicolas Anelka, Patrice Evra, Franck Ribéry et Jérémy Toulalan possèdent désormais dix jours pour faire appel devant la FFF, un appel qui n’est pas suspensif.
Les sanctions, prises à l’unanimité, prennent effet à partir de lundi et n’englobent pas le match amical Norvège - France, pour lequel Laurent Blanc avait décidé de se passer des 23 joueurs convoqués en Afrique du Sud. Les auditions d’hier se sont déroulées dans un climat courtois et parfois empreint d’émotion avec les interventions de Jean-Pierre Escalettes, l’ancien président de la FFF, et Raymond Domenech, invités en qualité de témoins. Au cours des échanges, l’ex-sélectionneur s’est montré particulièrement digne et sobre. Devant l’assistance, il a tenu à démentir une rumeur lancée par les joueurs : « Je n’étais pas la taupe de la presse. »
Anelka a refusé de s’excuser
Dix-huit matchs de suspension, soit environ deux ans de privation des Bleus : Nicolas Anelka a été sévèrement sanctionné, beaucoup plus que prévu. Sauf retournement de situation lors d’un éventuel appel, c’est la fin de sa carrière internationale. Le joueur ne s’est pas présenté au siège de la Fédération hier. Aucun avocat ne le représentait, aucun mémoire en défense n’est parvenu jusqu’à la commission.
Cette dernière a demandé à Raymond Domenech et Alain Boghossian, l’entraîneur adjoint des Bleus également convié comme témoin, puis aux joueurs présents quels avaient été les mots employés par l’attaquant. « Va te faire enculer avec ton équipe. Fais l’équipe que tu veux », ont répondu tous les interlocuteurs, pour qui les injures se sont arrêtées là.
Mais contrairement à ce que l’on aurait pu croire, le joueur de Chelsea n’est pas stricto sensu sanctionné pour ses insultes. Il paie pour deux raisons. D’abord parce qu’il a « fui » le sélectionneur à Knysna afin d’éviter de s’excuser face à lui. « Il l’a évité délibérément, il n’a jamais voulu reconnaître son erreur », dit-on à la FFF. Sa désinvolture depuis le début de cette affaire a également été prise en compte. Il n’a répondu ni à la mission d’information ni à la commission de discipline. Comme si les Bleus ne l’intéressaient pas. Désormais, ce sont les Bleus qui ne s’intéresseront plus à lui.
Evra, un « leader négatif »
La commission a estimé que le capitaine des Bleus lors du Mondial a joué un rôle de « leader négatif ». Même si toutes les sanctions ont été prises à l’unanimité des neuf membres, la sienne a été âprement discutée. Un compromis a été trouvé avec ces cinq matchs, qui équivalent en fait à six mois de suspension.
Devant ses juges, Patrice Evra a peu parlé, laissant son avocat le défendre. Ce dernier, comme le conseil d’Eric Abidal, a contesté les griefs formulés à l’encontre de son client et stigmatisé le renvoi de cinq joueurs et non des 23 du Mondial, comme le préconisait la mission d’information. Les témoins des débats ont trouvé Evra « atteint » par cet épisode du bus. Le joueur de Manchester United, qui a d’abord reconnu que cette grève était une « bêtise », s’est dit « piégé » par l’engrenage des événements : « J’ai tout fait pour limiter la casse mais on était dans notre bulle. On ne s’est pas rendu compte de ce qu’on faisait. On était coupés de la réalité. Si c’était à refaire, je ne le referais pas », s’est justifié le latéral.
Ribéry en a trop fait à « Téléfoot »
Son passage dans l’émission « Téléfoot » le matin même de la mutinerie a exaspéré les membres de la commission. Le joueur, au bord des larmes, s’était invité sur le plateau de TF 1 pour parler avec son coeur alors qu’il savait que l’après-midi, il y aurait grève. Les juges ont décelé là un acte de comédie qui lui vaut ses trois matchs de suspension.
Toulalan « assume » mais ne « balance » pas
Le Lyonnais a confirmé que son attaché de presse avait rédigé en partie le communiqué lu par Domenech. « J’assume », a-t-il dit devant les juges, qui ont apprécié sa franchise. « Mais mon conseiller n’était pas seul pour l’écrire », a-t-il ajouté. « Qui d’autre ? », a questionné la commission. Pas de réponse du joueur, qui n’a pas voulu « balancer » l’entourage de Squilacci et Govou, également dans le coup. Domenech a reconnu ses torts dans la lecture du texte : « J’ai mal géré cette histoire. Jusqu’au bout, j’ai cru qu’ils allaient s’entraîner. Quand j’ai compris que ce ne serait pas le cas, de guerre lasse, j’ai lu le communiqué, qu’on en finisse ! »
L’instance disciplinaire a également interrogé le joueur sur la grève : « Que se serait-il passé si l’un d’entre vous s’était levé dans le bus et avait dit : On reprend l’entraînement ? » « Peut-être que tout le monde aurait suivi », rétorqua alors Toulalan, laissant entendre que la grève n’avait tenu qu’à un fil.
Abidal dédouané par Domenech
Le latéral a été complètement absous. L’accusation s’est effondrée d’elle-même. Il était excité dans le bus ? « Oui, j’ai tapé sur la vitre pour que le car redémarre, a-t-il expliqué. Cela devenait grostesque alors j’ai dit : Allons-y ! » Convaincant. Il a refusé de jouer France - Afrique du Sud ? Domenech l’a blanchi. L’ancien sélectionneur a confirmé les propos du défenseur : la décision a été prise d’un commun accord, l’ex-Lyonnais ne se sentant pas en état, physique et psychologique, de disputer une rencontre internationale.