Anelka ne doit plus jamais porter le maillot de l'équipe de France
La déroute de l'équipe de France contre le Mexique pourrait avoir des conséquences qui dépassent largement le cadre de la Coupe du monde. Et si la sortie de route contre les Mexicains élimine quasiment les Bleus du tournoi, elle révèle sur le terrain comme en dehors la déliquescence qui a atteint ce groupe et son staff. Avant d'annoncer sa liste des 30, Raymond Domenech avait pourtant montré les muscles : "la leçon (de l'Euro 2008), c'est qu'ils (les joueurs) doivent être intelligents et dépasser leur ego pour penser que c'est l'équipe qui compte, pas eux. S'ils n'ont pas compris ça, je mettrai des coups de fusil !" Le sélectionneur a pu apprécier à la mi-temps de France-Mexique la riposte tout en finesse de Nicolas Anelka, peu enclin comme certains de ses partenaires à reconnaitre l'autorité du patron.
La bordée d'injures lâchée par l'attaquant est un nouvel éclair dans le ciel orageux des Bleus, et un nouveau casse-tête pour un staff qui continue de s'emmêler les pinceaux dans une communication étrange. Le point presse, prévu à 13h ce samedi, a ainsi été décalé à un nouvel horaire qui n'a pas été précisé, a sobrement indiqué l'encadrement. La pratique est devenue courante, et la situation de crise actuelle semble renforcer le malaise, au pire moment, alors qu'Anelka est apparu normalement à l'entraînement vendredi. La réaction du sélectionneur aux insultes de son joueur se fait donc attendre, et les voix sont déjà nombreuses à s'élever pour demander l'exclusion pure et simple du supposé enfant terrible du foot français.
Le directeur technique national, Gérard Houllier, est monté au créneau au micro de RMC : "C'est au sélectionneur de dire : Tu fais tes valises et tu rentres. Si je suis responsable, c'est ce que je fais. Honnêtement, j'ai été choqué". Hors du sérail, les propos sont plus virulents. Michel Hidalgo, ancien sélectionneur de l'équipe de France (1978-84), appelle ainsi sur RTL à l'éviction définitive du joueur. "L'insulte d'Anelka est méprisable", a déclaré Hidalgo. "Il ne doit plus porter le maillot de l'équipe de France. A mon avis, il ne portera plus jamais ce maillot. Ces propos sont consternants". Autre glorieux ancien, Just Fontaine a jugé "lamentable" la situation chez les Bleus et a prédit un avenir sombre pour la sélection si Nicolas Anelka n'en est pas exclu rapidement. "Ce qui arrive à l'équipe de France est débile, lamentable, pitoyable. Il faut virer Anelka", a-t-il dit samedi à Reuters.
"C'EST DÉBILE !"
L'ancien attaquant des Bleus, qui détient le record du nombre de buts marqués en une édition de la Coupe du monde (13 buts en 1958), est très remonté, et rappelle le précédent Cantona. "Pour en avoir dit beaucoup moins que ça à Henri Michel, (Eric) Cantona n'a plus jamais rejoué en Equipe de France. Et Cantona, malgré ses humeurs, c'était quand même autre chose sur un terrain !", a ajouté Kopa. Eric Cantona avait qualifié Henri Michel de "sac à merde" lorsque ce dernier dirigeait l'équipe de France. Le joueur n'avait plus été appelé par ce dernier mais avait retrouvé le maillot bleu sous la direction de Michel Platini. "Anelka est un ingrat, en plus. Domenech lui a conservé sa confiance malgré ses piètres prestations depuis cinq matches. Et contre le Mexique, encore, au lieu d'aller en pointe comme on le lui demandait, il a préféré aller em... tout le monde au milieu rien que pour le plaisir de montrer sa technique. Parce qu'il n'a plus que ça", a ajouté Just Fontaine. "Le pire, c'est que Gourcuff en a été victime. Le seul joueur intelligent qui sache faire une passe en profondeur précise. C'est débile !"
Le ton est moins enflammé mais tout aussi ferme du côté du vice-président de la Fédération française de football, Christian Teinturier, qui a expliqué sur France Info que "si les mots ont été employés, il (Anelka) n'a plus rien à faire là-bas... Ou alors à ce moment-là, on accepte tout". M. Teinturier a estimé que Jean-Pierre Escalettes, président de la FFF, devrait prendre une telle décision. "Il aurait dû être expulsé tout de suite, ou s'excuser. Sinon il ne devrait pas réapparaître sous un maillot d'entraînement de l'équipe de France", a-t-il ajouté. Pour ce vice-président de la FFF, "c'est le déclencheur d'un état d'esprit et d'un climat qui est détestable. (Raymond Domenech) a fait confiance à ce garçon pendant quatre matches, cinq matches, c'est incompréhensible, c'est proprement scandaleux".
"DES MODÈLES"
Présente à Knysna avec l'équipe de France, la ministre de la Santé et des Sports, Roselyne Bachelot, a réagi dans un communiqué appelant les joueurs de l'équipe de France à "la retenue et à la dignité", sans citer directement Anelka. "La très forte pression qui pèse sur les Bleus n'autorise pour autant aucun dérapage", écrit la ministre des Sports. "Les joueurs doivent se rappeler qu'ils portent les couleurs de la France et qu'ils sont considérés comme des modèles par beaucoup de jeunes" ajoute-t-elle.
Nicolas Anelka n'en est pas à son coup d'essai avec les sélectionneurs en équipe de France. En août 2003, il avait déclaré dans l'hedomadaire Paris Match à propos de Jacques Santini : "Je n'ai pas besoin de l'équipe de France. Qu'il s'agenouille devant moi, s'excuse d'abord, et après je réfléchirai". Au début de l'ère Domenech, il avait lancé : "Je pense que je ne reviendrai pas en bleu tant que Raymond Domenech sera en place. Même quand il y a 60 000 blessés, il ne me prend pas !". Puis, le joueur avait fait amende honorable et le 5 octobre 2006 Raymond Domenech l'avait rappelé dans le groupe France, avant de faire de l'attaquant un de ses hommes de base. Pour le résultat que l'on sait.