Outreau: le juge Burgaud prétend ne pas avoir «failli»
Le juge Fabrice Burgaud, entendu par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) sur son instruction du fiasco judiciaire d'Outreau, a assuré ce lundi qu'il n'avait «failli d'aucune sorte à (son) serment de magistrat».
«Je n'ai commis aucune faute disciplinaire, ni de près ni de loin. Je n'ai failli d'aucune sorte à mon serment de magistrat», a affirmé Fabrice Burgaud, tout en soulignant qu'il ne prétendait pas «avoir mené une instruction parfaite».
Cette comparution devant le CSM représente «l'occasion, sans doute la première véritable (...) de pouvoir m'expliquer», a -t-il ajouté.
Huit ans après le début de son enquête au tribunal de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) sur cette affaire d'abus sexuels sur mineurs -qui s'est soldée par 13 acquittements- Fabrice Burgaud comparaît devant ses pairs toute cette semaine. L’affaire d’Outreau reste comme l’un des plus grands fiascos judiciaires français.
Cet après-midi, le juge Burgaud a considéré que les conclusions «de dernière minute», déposées le 20 janvier par la Chancellerie, «ne reposaient sur aucun élément sérieux».
La défense dénonce «la stratégie politique» de la Chancellerie
Avant lui et dès l'ouverture de l'audience ce matin, les défenseurs du juge ont accusé la Chancellerie d'obéir à une «stratégie politique» pour «avoir la tête» du magistrat qui a instruit le fiasco judiciaire d'Outreau.
C'est le ministère de la Justice qui a saisi le CSM en juillet 2006, malgré une enquête interne qui concluait certes à des «insuffisances» mais ne voyait aucune faute disciplinaire. Dans cette note du 20 janvier dernier, la directrice des services judiciaires, Dominique Lottin, estime notamment que le juge Burgaud a commis une «accumulation de manquements» au «caractère systématique voire volontaire», introduisant donc l'idée que c'est «délibérément» et non par inexpérience que le juge a renvoyé des innocents devant le tribunal.
L'avocat de fabrice Burgaud, Me Maisonneuve a souligné ce matin que cette note intervenait «dans les moments» suivant «l’annonce de la suppression du juge d’instruction», par le président Nicolas Sarkozy, «un juge dangereux, incontrôlable». «Il faut supprimer le juge d’instruction, alors commencez par supprimer celui-là», a lancé l’avocat selon lequel «il faut avoir la tête du juge Burgaud».
La défense a d'ailleurs demandé que la note soit écartée, mais après une heure de délibérations, le président de la cour de Cassation a rejeté la demande, estimant notamment que cette note n'attentait pas aux droits de la défense.
Le juge Burgaud s'explique point par point
Lisant une déclaration dactylographiée, Fabrice Burgaud s'est donc expliqué cet après-midi sur chacun des griefs qui lui sont faits par la Chancellerie.
Alors qu'il lui est reproché des «vérifications insuffisantes» durant l'instruction de cette affaire d'abus sexuels sur mineurs, menée de 2001 à 2002, Fabrice Burgaud a souligné que «les vérifications effectuées ont été jugées suffisantes tant par le juge d'instruction qui m'a succédé (en août 2002, ndlr) que par la chambre de l'instruction» de la cour d'appel de Douai.
«L'absence de confrontation» entre les mineurs et les adultes mis en cause a été «entièrement confirmée par la chambre de l'instruction», organe chargé du contrôle des actes d'instruction.
Le «manque de méthode» est l'un des autres griefs faits au magistrat, qui a expliqué avoir «régulièrement organisé des réunions de travail» entre les différents services enquêteurs qui se sont vus délivrer «des axes clairs». Il a dit avoir recouru à une «méthode classique» et s'être «efforcé de recouper les déclarations des mineurs avec celles des adultes».
Concernant le crédit excessif qu'il aurait accordé à certains enfants, Fabrice Burgaud a assuré avoir exercé «une analyse critique» de leurs déclarations à travers des "expertises psychologiques".
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