Bon alors après une petite soirée entre ami(e)s rien de tel que les 2 derniers épisodes d'Ergo Proxy pour se remettre de tout ça

Par où commencer, tellement il y a de chose à dire...
Sans nul doute que le point fort d'Ergo Proxy est l'animation. Celle-ci est soignée, les nuances de couleur utilisées m'ont véritablement scotchée : cela faisait longtemps que je n'avais pas vu une anime aussi belle.
Les scènes d'action, qui a ma grande surprise se font très rares, sont totalement maîtrisées et d'une violence qui tranche avec le ton général de l'anime permettant ainsi de les sublimer.
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On appréciera notamment l'utilisation à bon escient du ralenti lors de la scène du centre commercial, lorsque Vincent Law est poursuivi par le Proxy. Pour moi la meilleure scène.
Côté scénario, c'est du grand, même du très grand classique sans la moindre originalité. Un ton noir et pessimiste, une Terre futuriste totalement dévastée, des cités surdéveloppées technologiquement avec un régime politique plus que dictatorial. Un monde où les robots (autoreiv) et les humains se côtoient... J'ai même eu l'impression en visionnant les premiers épisodes d'assister à un remake du film Blade runner. Bref, du tellement classique que l'on en arrive même parfois à anticiper la suite d'un épisode à l'autre (surtout lors des premiers).
A noter les deux "OVNI" que sont les épisodes 15 et 19, qui m'ont laissée comme un goût d'incompréhension...
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Episodes cependant capitaux car le premier nous révèle des éléments importants pour la compréhension de l'histoire et le deuxième permet de mieux cerner la personnalité de Pino (voir plus bas)
Non, ce qui fait qu'Ergo Proxy est une oeuvre à part est le ressenti que l'on éprouve après la visualisation. Plus on avance dans l'histoire et plus on se dit qu'en fin de compte ce scénario si bateau n'est pas aussi simple et nous cache quelque chose d'autre qu'une simple histoire de Proxy...Notamment par la complexité des personnages et l'ambiance générale.
Si de premier abord, Re-l Mayer est dans la lignée de la pure héroïne de SF (style gothique, égoïste et cynique à souhait, froide mature...), petit à petit elle s'humanise se rapprochant plus de la "petite fille à papa à qui tout est du" après sa rencontre avec le monde extérieur.
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Un exemple frappant de cette évolution est la scène de la coiffure lorsqu'Iggy n'est plus là.
L'évolution de Re-l Mayer dans le scénario est d'ailleurs très étonnante, personnage principal des premiers épisodes, elle laisse peu à peu cette place à Vincent Law pour ne devenir qu'un personnage secondaire comme les autres
Vincent Law, est pour moi le personnage qui évolue le plus au fil des épisodes. Un peu "coincé", timide au début, il prend peu à peu confiance en lui, devient plus mature. Chaque étape de son voyage le forgeant petit à petit et l'amenant inéluctablement à la vérité.
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On retiendra surtout l'épisode de la librairie tournent majeur de son évolution et de l'acceptation de son identité.
Tout comme Re-l Mayer, une fois Mosque atteint, il s'aidera sa place de personnage principal à la petite Pino
Pino est certainement le personnage le plus intéressant de cette série. Autoreiv infecté par le cogito, on suit avec une certaine naïveté et tendresse l'acquisition de ses émotions comme on le ferait avec un enfant. Paradoxalement, Pino est sans nul doute le personnage le plus "humain" bien qu'elle ne soit qu'un Robot...
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L'épisode 19 m'a permis de faire le lien entre Pino et Alice au Pays des merveilles. Conte, que si on regarde bien, elle lit lorsqu'elle parle (si ma mémoire est bonne) du "chevalier de carte". Et puis, ce costume de lapin (certes rose et non blanc) n'évoque-t-il pas là encore ce conte de même que l'aspect graphique des personnages? Tout comme Alice, Pino cherche du bon sens à cette réalité et surtout à ces émotions qu'elle découvre épisode après épisode.
On retiendra aussi le subtil jeux de mot sur M. "Will b. Good" (être bon en français) personnage voulant à tout prix le bonheur d'autrui.
En regardant de plus près les personnages, je me dis que le scénario peut être découpé en 3 grands chapitres :
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- la découverte de la vérité : l'action y est principalement située à Romdeau et ces abords. On y apprend l'existence de vie autre qu'à Romdeau. Partie dont Re-l Mayer est le personnage principal.
- la quête de la vérité : l'action se situe dans le monde extérieur (voyage aller vers Mosque). Il s'agit de la quête du passé de Vincent Law. Partie dont Vincent Law est le personnage principal.
- le renouveau et l'avenir : l'action se situe dans le monde extérieur (voyage retour vers Romdeau) et Romdeau. Conclusion et renouveau de la société. Partie dont Pino est le personnage principal.
Mais, je crois que le véritable but (scénario?) des auteurs est de nous faire prendre conscience de la solitude rongeant les sociétés actuelles et de l'actuelle fuite des humains vers d'autres mondes (virtuel, rêves...). En effet, la solitude et le désespoir sont constamment présents dans Ergo Proxy et ce sous différentes formes.
Tour à tour, les personnages éprouveront ces sentiments chacun à leur manière :
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- Re-l Mayer : la solitude de l'être trahi, d'avoir été manipulé.
- Vincent Law : la solitude et le désespoir de ne savoir qui il est vraiment.
- Pino : il s'agit du premier sentiment qu'elle acquiert lors de la mort de Timothy. S'en suivront la peur et l'amour. Evolution s'inscrivant parfaitement dans la logique du renouveau d'un monde.
- Iggy : la solitude puis la colère de l'être ignoré.
- Daedalus : la solitude d'un amour à sens unique.
- Raul Creed : la solitude de l'homme de pouvoir (il ne voit quasi jamais sa famille) et le désespoir de la vérité.
- Le doyen et "ses poupées" : la solitude et le désespoir de l'échec.
- Le Proxy de feu (j'ai perdu son nom) : la solitude et le désespoir de la mort de l'être cher.
La mise en scène nous amène aussi directement à cette réflexion en proposant un graphisme totalement opposé entre Romdeau : cité vivante et lumineuse aux couleurs "chaudes" et le mode extérieur : tout en brume, en nuance de couleurs "froides" et dénué de vie. Nous plongeant ainsi directement dans la solitude des personnages et ce malaise qui les gagne.
Malaise accentué et qui finit par envahir le téléspectateur (enfin pour moi

), de par l'enchaînement d'épisodes sans transition, qui nous amène directement au coeur d'une action dont le point de départ n'est révélé qu'en fin d'épisode.
Mais, le summum de ce message est atteint lors de l'épisode 16
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Seuls au milieu de nulle part, les différents protagonistes ne vont qu'assouvir leurs besoins primaires : dormir, manger... Chacun étant seul dans son propre monde : Pino et ses jeux, Vincent et sa tourmente envers son identité, Re-l et son ennui.
En résumé, une anime graphiquement très réussie (avec un bande son électro-pop sympas) qui à première vue peut paraître assez basique mais ne prend tout son sens qu'après un visionnage de l'intégralité des épisodes, nous interrogeant du même coup sur notre société et la place que l'on y occupe. On regrettera toutefois la lourdeur de certains passages "philosophiques" et références à la religion chrétienne. Une anime qui mérite que l'on s'y intéresse.